- RAYONS X COSMIQUES
- RAYONS X COSMIQUESOpaque aux rayons X, l’atmosphère terrestre empêche l’observation des photons X extraterrestres depuis le sol. La date de naissance de l’astronomie des rayons X peut être située le 18 juin 1962, lorsqu’un détecteur sensible à ce type de rayonnement, placé à bord d’une fusée-sonde de la N.A.S.A., découvrait l’existence d’une source X située hors du système solaire. Cette source devait être, par la suite, identifiée à un système stellaire de type particulier, dénommé Scorpius X-1. Les expériences en fusées-sondes, puis en satellite, montraient que cette source n’était pas unique. Lancé depuis le Kenya le 12 décembre 1970, jour anniversaire de l’indépendance du pays, le satellite américain Uhuru (en swahili: «liberté») permettait de cataloguer 339 sources de rayons X dans le ciel, dont une centaine dans notre Galaxie. On doit aussi à ce satellite la découverte des sources «pulsantes» et des sources à éclipses. De nombreux progrès, notamment dans l’étude des sources extragalactiques, ont ensuite été réalisés par les satellites A.N.S., Ariel-5, O.S.O.-8, puis H.E.A.O.-1.Avec H.E.A.O.-2 (1978-1981) puis Rosat (lancé le 1er juin 1990), ce sont de véritables observatoires d’astronomie X qui furent mis sur orbite. On sait maintenant que la plupart des sites astrophysiques émettent des rayons X: systèmes binaires serrés, restes de supernovae, milieu interstellaire, couronnes stellaires, amas de galaxies, galaxies actives, quasars...L’astronomie des rayons X constitue une branche à part entière de l’astrophysique. Elle est devenue indispensable pour comprendre les phénomènes physiques dans les sites les plus variés.1. Évolution des techniques de détectionLes premières observations astronomiques dans le domaine des rayons X ont été réalisées avec des télescopes extrêmement sommaires. Ces instruments comprenaient un détecteur de photons, du type compteur proportionnel, permettant de mesurer l’énergie de chaque photon détecté avec une précision relative de l’ordre de 20 à 40 p. 100. L’effet directionnel indispensable à toute étude astronomique était assuré par un collimateur mécanique constitué de grilles, plaques ou tubes dont l’agencement délimitait la portion du ciel à observer. La résolution angulaire obtenue était de l’ordre du degré (fig. 1 a).Le caractère exceptionnel et inattendu des premiers résultats n’a pas empêché les expérimentateurs de prendre conscience de la médiocrité des résolutions spectrale et angulaire de ces télescopes et les a incités à développer de meilleurs instruments.Les progrès réalisés varient avec la gamme d’énergie considérée.Détection à basse énergie (E size=5麗 5 keV)Dans ce domaine, l’amélioration de la résolution angulaire a été spectaculaire grâce à l’emploi de véritables optiques comportant des miroirs paraboliques et hyperboliques (fig. 1 b). Ces miroirs utilisent la propriété de tous les matériaux d’avoir, pour les rayons X, un indice de réfraction très légèrement inférieur à l’unité. Cela signifie que, pour des incidences très rasantes, les photons X subissent une réflexion totale. L’angle critique est de l’ordre de 1 degré aux environs de 1 kiloélectronvolt, et il décroît très rapidement lorsque l’énergie augmente. Cela explique qu’en pratique les optiques en rayons X ne sont efficaces qu’à très basse énergie. À titre d’exemple, citons le télescope de l’observatoire Einstein (H.E.A.O.-2, lancé en 1978), dont le diamètre était égal à 60 cm et la distance focale à 3,5 m. La surface collectrice était de 800 cm2 et la résolution angulaire de quelques secondes. Le satellite européen Exosat (1983-1986) était équipé de deux télescopes de ce type, cependant un peu plus petits. Le satellite allemand Rosat (Röntgen Satellite), avec son optique également à incidence rasante et son détecteur imageur, a mis en évidence plus de 50 000 sources X.On peut placer au foyer de ces télescopes divers instruments adaptés au type d’observation réalisé (fig. 1 c). Pour les observations demandant une bonne résolution angulaire, on utilise des détecteurs sensibles à la position , c’est-à-dire qui permettent de déterminer les coordonnées du lieu d’impact de chaque photon X détecté. Ces détecteurs ont une résolution spectrale faible (de l’ordre de 30 à 50 p. 100 pour les compteurs proportionnels) ou nulle (pour les galettes de microcanaux). Pour les analyses spectrales, on utilise: des détecteurs semiconducteurs à basse température; des spectromètres de Bragg; des réseaux de diffraction par transmission.Les réseaux de diffraction par transmission fonctionnent comme les objectifs utilisés dans le domaine visible et sont constitués d’une grille en matière opaque aux rayons X. Ce réseau, placé à la sortie du télescope, donne dans le plan focal un spectre de chacune des sources contenues dans le champ.Domaine des énergies élevées (5 à 100 keV)Dans ce domaine, la réflexion totale en incidence rasante est, nous l’avons vu, inutilisable. Il a donc fallu trouver d’autres techniques qui dérivent toutes du télescope primitif.Le premier progrès a été l’utilisation du collimateur à modulation (fig. 1 d). Ce collimateur est constitué de deux nappes de fils parallèles régulièrement espacés. Le déplacement d’une source dans le champ du télescope produit une modulation du flux transmis par le collimateur et perçu par le détecteur. Cette technique permet de sélectionner plusieurs régions du ciel pouvant contenir la source responsable de la modulation, mais ne permet pas de définir laquelle contient effectivement la source. Pour éliminer cette ambiguïté, on utilise un second télescope comportant un collimateur à modulation avec un pas (espace entre fils) différent. On obtient ainsi une sorte de vernier qui permet de déterminer la position de la source observée avec une précision de l’ordre de la minute d’angle. Ce type de télescope est utilisé de deux façons: en mode de «balayage» (rotation autour d’un axe parallèle aux fils) ou en mode de «rotation» (rotation autour de l’axe du télescope). Le choix entre ces deux modes d’observation, qui donnent des résultats sensiblement identiques, dépend de la nature du pointage du vaisseau spatial utilisé.Le dernier progrès en matière de résolution angulaire porte sur la généralisation de la «chambre noire» utilisée en optique. Au lieu de placer un écran percé d’un simple trou en face d’une plaque photographique, on utilise un masque constitué de parties opaques ou transparentes au rayonnement X (fig. 1 e). Une source de rayonnement située dans une direction donnée projette l’ombre des parties opaques sur le plan du détecteur sensible à la position (qui remplace la plaque photographique). Le choix du masque ou fonction de codage est tel qu’à une ombre portée donnée correspond une seule direction dans le ciel. Lorsque plusieurs sources sont situées dans le champ observé, l’image enregistrée est la superposition des ombres portées par chacune d’elles. L’image obtenue doit être interprétée ou décodée à l’aide d’un ordinateur. Ce télescope permet d’atteindre une résolution angulaire de l’ordre de 1 minute dans un champ de plusieurs dizaines de degrés. Il est particulièrement efficace pour l’observation et la détection des sources X rapidement variables.En ce qui concerne les observations spectroscopiques, on peut se limiter à signaler les instruments suivants:– les compteurs proportionnels (résolution égale à 20 p. 100 à 6 keV);– les compteurs proportionnels à scintillation (résolution de 8 p. 100 à 6 keV);– les semiconducteurs refroidis en silicium ou en germanium;– les spectromètres à cristaux de Bragg dont les performances spectaculaires sont cependant limitées aux énergies les plus basses (E 麗 10 keV).2. L’astronomie galactiqueLe premier catalogue de sources X a été établi grâce aux détecteurs placés à bord du satellite américain Uhuru, sensibles dans le domaine d’énergie s’étendant de 2 à 20 kiloélectronvolts.Mis en orbite en 1970, ce satellite a permis de localiser plusieurs centaines de sources X. La figure 2 montre la répartition dans le ciel des plus brillantes de ces sources. Les sources les plus intenses sont concentrées autour de la trace du plan galactique dans le ciel, indiquant que la plupart d’entre elles appartiennent à notre Galaxie.La source la plus proche (et la plus intense), Scorpius X-1, n’est qu’à quelques centaines d’années de lumière du système solaire. Les sources les plus éloignées connues sont des quasars, ce qui les classe parmi les objets les plus énergétiques en émission de l’Univers: leur luminosité en rayons X peut atteindre quelque 1041 watts, soit plus de dix milliards de fois l’énergie que le Soleil émet dans le visible.Les objets compacts dans les systèmes binairesLa compréhension des mécanismes de production du rayonnement X dans ces sources a progressé grâce à l’étude spectrale du rayonnement émis, à l’enregistrement des variations temporelles du flux pour différentes échelles de temps, et à la localisation précise des sources d’émission.On a pu ainsi observer pour certaines sources comme Centaurus X-3 (fig. 3) des disparitions périodiques. Les périodes mesurées (de l’ordre de quelques jours) ont permis de comprendre que ce phénomène était en fait une éclipse, et que la source X faisait partie d’un système binaire d’étoiles. De plus, pour certaines de ces sources (fig. 4), le rayonnement observé est «pulsé»: les périodes de pulsation vont de 0,7 à 835 secondes. Cette caractéristique a conduit à donner le nom de pulsars X à ces sources, par analogie avec les pulsars découverts en radio. On sait que, dans ce dernier cas, l’émission provient d’étoiles à neutrons en rotation sur elles-mêmes. Dans le cas des sources X, le temps d’arrivée des impulsions est modulé, et cette modulation est attribuée à l’effet Doppler-Fizeau dû au mouvement de la source X sur son orbite.Par ailleurs, la localisation précise des sources X a permis d’associer la plupart d’entre elles à des étoiles déjà cataloguées dans le visible. Le tableau donne les propriétés et les identifications obtenues pour les sources X les plus remarquables.Ainsi, la compréhension de l’ensemble de ces phénomènes a permis de mettre au point le modèle (schématique) suivant. Le système binaire est composé d’une étoile à neutrons, d’une masse égale à une masse solaire, tournant sur elle-même et en orbite autour d’une étoile plus massive. Le rayonnement X est produit lors de la capture, par l’étoile à neutrons, de la matière éjectée par l’étoile plus massive sous forme de vent stellaire ou par débordement de son lobe de Roche. Cettematière est canalisée par le fort champ magnétique de l’étoile à neutrons jusqu’à la surface de celle-ci, produisant deux zones surbrillantes en rayons X près des pôles magnétiques.L’existence de forts champs magnétiques (de l’ordre de 108 teslas) à la surface des étoiles à neutrons a été confirmée par l’observation des raies d’émission dites «cyclotrons» dans le spectre de certaines sources X. Dans le cas d’Hercules X-1, cette raie est émise à une énergie de 60 kiloélectronvolts. Elle est attribuée à l’émission d’électrons relativistes dans un fort champ magnétique.Cependant, la majorité de l’émission provenant des sources X a une origine thermique. Elle provient de l’échauffement de la matière capturée lorsque son énergie cinétique provenant de la force d’attraction est transformée en chaleur. Avec un rayon de l’ordre de 10 kilomètres et une masse de l’ordre de 1 masse solaire, une étoile à neutrons a un potentiel gravitationnel si élevé à sa surface que l’équivalent en énergie de 10 p. 100 de la masse capturée peut être libéré par ce processus sous forme de rayonnement (contre 1 p. 100 pour les processus thermonucléaires). On explique ainsi très bien les fortes luminosités observées pour certaines des sources X, ainsi que la forme du spectre du rayonnement.Enfin, en ayant par ailleurs une estimation de la distance, on peut déterminer les paramètres du système binaire: dimension, masses des étoiles, etc., à partir de l’observation (cf. la représentation schématique de la fig. 5). Pour rendre compte de l’existence de tels systèmes, il a fallu développer des modèles théoriques d’évolution de systèmes binaires d’étoiles, au cours de laquelle une des étoiles explose sous forme de supernova et se transforme en étoile à neutrons. La durée pendant laquelle le système est une source X est faible par rapport à la durée de vie totale d’un tel système, ce qui explique le nombre relativement faible de sources X galactiques observées (fig. 6).Bien que les sources pulsantes soient minoritaires parmi les sources X galactiques, on pense que le phénomène de capture est à la base du rayonnement X observé dans la majorité des cas, les luminosités X observées ne pouvant être expliquées que par ce phénomène. Plusieurs centaines de sources X sont maintenant identifiées à des étoiles observées dans le visible. Le fait qu’aucune périodicité ne soit observée pourrait être dû soit à la position de l’observateur par rapport au système, soit à l’absence de champ magnétique autour de l’étoile à neutrons (ou à l’alignement de l’axe magnétique par rapport à l’axe de rotation). D’autre part, dans certains modèles, l’étoile compagnon a une masse plus faible que l’étoile à neutrons, et dans ce cas c’est elle qui tourne autour de l’étoile à neutrons: de tels modèles expliquent l’absence d’observation d’éclipses.Le cas de Cygnus X-1Dans ce système, l’étoile compagnon de la source X a été identifiée optiquement à une étoile massive de type spectral B 0, d’une masse égale à 30 Mo. Cependant, la détermination de la masse de l’objet compact conduit à une valeur de 7 Mo. Une étoile à neutrons ne peut atteindre une telle masse; les seuls objets compacts prévus par la théorie avec une telle masse sont les trous noirs.Dans un système binaire composé d’une étoile massive et d’un trou noir, la théorie prédit qu’il se forme un disque d’accrétion et que le rayonnement X observé provient de l’échauffement de la matière du disque. Cette matière est en orbite autour du trou noir, et, dans cette configuration, la dernière orbite stable a une période de 10 millisecondes. Si une zone émissive de rayons X existe sur cette orbite, même pendant un intervalle de temps court, un observateur recevra des bouffées de rayons X avec une périodicité de 10 millisecondes. Cette périodicité a été effectivement observée lors de la mesure du flux de rayons X provenant de Cygnus X-1. Cette mesure, venant après la détermination de la masse de l’objet compact (7 Mo), a renforcé l’idée que cet objet compact pouvait être un trou noir.Sources transitoires, sources à boufféesOn connaît par ailleurs des sources pour lesquelles les variations temporelles ne sont pas périodiques. Par exemple, les sources transitoires ont, en rayons X, un comportement semblable aux novae en optique. Elles apparaissent brusquement dans le ciel, puis leur flux décroît en quelques jours. On pense que certaines de ces sources sont des systèmes binaires dont l’orbite est très excentrée. L’étoile à neutrons ne peut capturer suffisamment de matière pour émettre du rayonnement que dans la partie de l’orbite où elle se trouve le plus près de l’étoile compagnon.Les sources à bouffées ont un comportement tout à fait différent. En moins d’une seconde, quelquefois, elles deviennent plus brillantes que la plus brillante des sources X «calmes», mais leur flux décroît en quelques secondes ou en quelques dizaines de secondes (fig. 7). Ce phénomène se répète plusieurs fois par jour ou plusieurs fois par mois suivant les sources. La centaine de sources à bouffées connues sont pour la plupart concentrées autour du centre de la Galaxie. Elles sont vraisemblablement associées à des étoiles plus anciennes que les étoiles massives des pulsars X, ce que confirment les types spectraux (K ou G) attribués aux étoiles qui leur sont associées. Ces étoiles ont des masses plus faibles, comprises entre 0,5 et 1 Mo.Le processus envisagé pour expliquer de telles bouffées est le suivant. Comme auparavant, la capture de matière se produit sur une étoile à neutrons, mais probablement sans champ magnétique. Cette matière produit l’émission continue (si elle existe) et se dépose à la surface. À cause du fort champ gravitationnel de l’étoile, elle se comprime et s’échauffe suffisamment pour que, à sa base, des réactions thermonucléaires s’y produisent. Ainsi l’hydrogène se transforme en hélium, lequel hélium va, à son tour, se comprimer et subir des réactions thermonucléaires. L’épaisseur des couches d’hydrogène et d’hélium ne dépasse pas 1 mètre!Cependant, la fusion de l’hélium est instable à cause d’une très forte dépendance du taux de réaction avec la température. Il se produit alors un «flash» thermonucléaire quand la quantité de matière capturée est suffisante. Le transport de l’énergie vers la surface se traduit par la bouffée de rayons X. Les caractéristiques de ces bouffées calculées avec ce modèle (temps de montée, pic de luminosité, durée, intervalle entre les bouffées) correspondent assez bien aux valeurs observées.Les étoilesLes satellites X ont radicalement modifié notre vision des sources X stellaires. Auparavant, de telles émissions semblaient l’apanage d’un petit nombre d’objets stellaires «exotiques» et particulièrement énergétiques. L’observatoire Einstein a, par exemple, détecté cent quarante-trois étoiles émettrices de rayonnement X, de luminosité assez faible variant de 1018 à 1024 watts pour les étoiles de type tardif, et de 1024 à 1027 watts pour les étoiles jeunes (O-B). C’était la découverte que toute étoile, quelles que soient ses caractéristiques – type spectral, luminosité, masse, âge, etc. –, est émetteur X. L’étude spectroscopique de cette émission est relativement complexe. Il existe cependant de fortes présomptions en faveur de l’émission thermique d’un plasma chaud associé à l’étoile. Le résultat le plus frappant a été la détection de raies d’émission du magnésium, du silicium et du soufre dans le spectre de Capella, «signature» de l’émission d’un plasma porté à environ 107 kelvins.À l’heure actuelle, le mécanisme qui semble jouer un rôle prépondérant est l’émission de rayons X par une couronne stellaire, c’est-à-dire un plasma chaud confiné au voisinage de l’étoile, ce qui apporte une réponse affirmative à la question, longtemps controversée, de la généralité des couronnes stellaires. L’étape suivante est la compréhension du processus par lequel l’étoile chauffe et confine le plasma de sa couronne. Les modèles généralement admis font jouer un rôle fondamental au champ magnétique stellaire. Celui-ci est en effet capable de confiner des plasmas de température très élevée, comme ceux qui sont observés, ce que le champ gravitationnel de l’étoile est incapable de faire. Il s’agit d’autre part d’un processus efficace de chauffage qui rend bien compte des luminosités observées. Ce type de modèle a été appliqué avec succès aux observations détaillées sur le Soleil. Il a été conforté par l’observation, dans les étoiles de type tardif (comme notre Soleil), de corrélations entre le flux X et la vitesse de rotation de l’étoile, indicatrice de son champ magnétique.Il est évident que des mesures spectroscopiques plus fines permettront d’étudier plus en détail la nature de l’émission X des étoiles «normales». On peut cependant d’ores et déjà dire qu’avec l’observation en X nous avons un nouvel accès à l’activité stellaire de surface, dont l’étude est extrêmement importante car directement responsable de la perte de masse et de mouvement cinétique de l’étoile; cette activité joue un rôle fondamental dans l’évolution stellaire. D’un autre point de vue, elle affecte l’équilibre du milieu interstellaire en masse et en abondances (par la matière qu’elle injecte) et en énergie (par sa contribution à l’émission de photons X énergétiques).Les restes de supernovaeLa première source X identifiée a été un reste de supernova, la nébuleuse du Crabe, dont l’explosion de l’étoile qui lui a donné naissance remonte à l’an 1054.Depuis cette première identification, l’émission X d’un millier environ d’autres restes de supernovae a été observée dans notre Galaxie tout comme dans les galaxies extérieures et en particulier dans les Nuages de Magellan. Pour ce type d’objet, les prévisions théoriques ont été vérifiées. En effet, alors que la plupart des types de sources X galactiques et extragalactiques ne correspondent pas aux schémas établis avant l’avènement de l’ère de l’astronomie X, plusieurs mécanismes d’émission par les restes de supernovae avaient été proposés, bien avant les premières observations. Ces prévisions étaient fondées sur deux arguments:– le rayonnement radio émis par un des restes de supernovae (la nébuleuse du Crabe) est produit par des électrons relativistes se déplaçant dans le champ magnétique relativement fort de la nébuleuse; par extrapolation, on pouvait prévoir dans certaines conditions une émission notable dans le domaine des rayons X;– le phénomène qui donne naissance à une supernova est l’explosion d’une étoile massive qui éjecte une forte fraction de sa masse dans le milieu interstellaire. La matière éjectée à grande vitesse (de l’ordre de 10 000 km 練 s-1) balaie devant elle la matière du milieu interstellaire; une onde de choc se forme, créant autour de l’étoile initiale une structure en couche de gaz assez chaud (106 à 107 K) pour produire une émission de rayons X.Les observations réalisées avec des détecteurs dotés d’une bonne résolution spatiale et spectrale, et en particulier avec les instruments d’Einstein, d’Exosat, de Rosat, ont confirmé ces prévisions. Ces observations permettent de distinguer deux types de restes de supernovae:– Ceux qui présentent un centre émissif plein sans structure en couche. L’exemple type est celui de la nébuleuse du Crabe (fig. 8 a). Son spectre d’émission X est continu (fig. 8 b) et s’étend suivant une loi de puissance jusque dans le domaine du rayonnement 塚. Son rayonnement X est polarisé, ce qui confirme que le mécanisme d’émission est identique à celui des ondes radio. L’absence d’émission thermique est probablement due à la faible densité du milieu interstellaire dans lequel l’explosion a eu lieu.– Les plus nombreux, ceux qui ont une structure en couche bien marquée et dont le spectre d’émission est purement thermique. Le reste de supernova appelé Cassiopée A, la plus puissante source de rayonnement radio, est un des plus beaux exemples de ce type (fig. 9 a). Son spectre d’émission observé avec le détecteur à semiconducteur de H.E.A.O.-2 est un spectre thermique caractérisé par la présence de raies (fig. 9 b). C’est un spectre typique de plasma à une température de l’ordre de quelque 106 kelvins dans lequel on peut identifier les raies ou plutôt les groupes de raies émis par les atomes très ionisés de silicium, de soufre, d’argon et de calcium.La faible résolution spectrale du détecteur à semiconducteur ne permet pas d’identifier chacune des raies. Cependant, une observation spectroscopique fine réalisée avec un spectromètre à cristal de Bragg au foyer du télescope de H.E.A.O.-2 a permis la séparation des raies les plus intenses émises par l’oxygène, le fer et le néon dans un reste de supernova plus ancien, Puppis A (fig. 10). Des observations de spectroscopie fine combinées avec les cartographies à haute résolution spatiale donnent des informations capitales sur la structure et l’évolution des restes de supernovae et leur interaction avec le milieu interstellaire environnant.Les observations dans le domaine des rayons X ont également permis de confirmer la présence d’objets denses dans certains restes de supernovae. En effet, les modèles de supernova laissent prévoir la formation d’une étoile à neutrons. Cet objet, qui a une masse de l’ordre d’une masse solaire et un diamètre de l’ordre de 10 kilomètres, provient de l’effondrement du noyau de l’étoile qui a donné naissance à la supernova. Dans certains des restes de supernovae, l’émission de cet objet central fortement magnétisé a été mise en évidence dans le domaine des rayons X (nébuleuse du Crabe, RCW 103, MSH 15 – 52, etc.). C’est cette étoile à neutrons tournant rapidement sur elle-même (30 tours à la seconde) qui est responsable de l’accélération des électrons relativistes qui jouent un rôle dominant dans l’émission de la nébuleuse du Crabe.On voit donc que l’observation des restes de supernovae peut apporter des informations capitales pour de nombreux domaines comprenant l’évolution des étoiles, la physique des objets compacts et la constitution du milieu interstellaire. Cependant, l’étude de ces objets ne date que de la fin des années 1970: il est certain que l’interprétation complète des observations faites par les différents satellites d’astronomie X apportera de nombreuses informations complémentaires.Le milieu interstellaire local. Le halo galactiqueDans le domaine des rayons X mous, pour des énergies de photons comprises entre 100 et 1 000 électronvolts, le milieu interstellaire n’est plus aussi transparent. Dans le plan galactique, la matière neutre empêche de détecter des photons produits à plus de 1 000 années de lumière.Dans ce domaine d’énergie, l’apparence du ciel est très différente de celle représentée en figure 2. Le rayonnement observé est dominé par un rayonnement diffus dont la brillance varie d’un facteur 3 à 4 entre le plan galactique et les pôles galactiques. Superposé à ce rayonnement quasi isotrope, on distingue des zones de surbrillance plus ou moins étendues. Les supernovae proches comme la dentelle du Cygne et le rémanent des Voiles y sont également visibles.Le rayonnement provenant de ces zones de surbrillance a un spectre caractéristique de l’émission d’un plasma chaud à plusieurs millions de degrés. Leur étendue et leur température font qu’on associe ces zones à l’existence de supernovae proches du système solaire, vieilles de plusieurs dizaines de milliers d’années, comme l’Éperon Nord galactique ou l’anneau de Monoceros.Le rayonnement diffus lui-même pourrait être dissocié en deux composantes. La première est prédominante à très basse énergie, entre 100 et 500 électronvolts. Elle provient de l’émission d’un gaz chaud à une température de 1 million de degrés entourant le système solaire sur une distance de 200 à 300 années de lumière. Le caractère thermique de ce rayonnement a été mis en évidence par l’observation en rayons X de raies caractéristiques du C V et du C VI (vers 300 eV) et de l’O VII (vers 600 eV). Ce plasma serait lui-même le reliquat d’une explosion de supernova il y a 200 000 ans. La seconde composante prédomine entre 500 et 10 000 électronvolts. Elle proviendrait de l’émission du halo de notre Galaxie, avec une température du gaz émissif de 3 millions de degrés.On savait déjà par les mesures de raies d’absorption en ultraviolet (notamment celles de Si IV et de C IV), dans le spectre d’étoiles du Nuage de Magellan ou dans le spectre de quasars, que le halo de notre Galaxie contient des quantités importantes de gaz à une température de 100 000 degrés. L’existence de gaz à plus haute température (100 millions de degrés), qui explique les mesures X, a été confirmée par les satellites japonais Tenma et Ginga dans les années 1980.3. L’astronomie extragalactiqueLes galaxies «normales»Avec l’avènement de véritables observatoires spatiaux d’astronomie X, la cartographie en rayons X des galaxies proches est devenue possible.On possède maintenant une connaissance détaillée du Grand Nuage de Magellan, galaxie irrégulière satellite de notre propre Galaxie. Plus de cent sources y ont été dénombrées, dont vingt-cinq restes de supernovae. Ce nombre est relativement élevé puisque la masse du Grand Nuage n’est que d’un dixième de celle de notre Galaxie. On a observé une forte concentration de sources X près de la région active 30 Doradus. Le même type d’observation a permis de révéler vingt-six sources X dans le Petit Nuage de Magellan, pour lequel on connaissait déjà la binaire X SMC X-1.M 31 est la seule galaxie importante suffisamment proche pour qu’on ait pu y détecter des sources d’une intensité comparable aux sources de notre Galaxie. Les positions de ces sources sont montrées sur la figure 11, superposées à une photographie de cette galaxie. On peut remarquer qu’un groupe important de sources y est associé avec la partie centrale et que la plupart des autres sont situées aux emplacements des bras spiraux. Cette observation confirme la division des sources X en deux grands groupes, comme dans notre Galaxie: d’une part, les sources X associées à des étoiles massives et situées dans les régions de formation d’étoiles (comme les bras spiraux); d’autre part, des sources associées à des étoiles plus anciennes comme celles qui sont contenues dans les amas globulaires (dix-sept des amas globulaires de M 31 sont des sources X).D’autres galaxies ont été étudiées en rayons X, mais elles sont trop éloignées pour qu’on puisse les étudier avec autant de détails. Une étude statistique portant sur plusieurs dizaines de galaxies, de types divers (irrégulières, spirales, elliptiques), a permis d’établir que la luminosité en rayons X des galaxies normales était bien corrélée avec leur luminosité optique.Les amas de galaxiesLes amas de galaxies sont de vastes ensembles de quelques dizaines à quelques centaines de galaxies liées par la gravitation.L’identification de certaines sources X à des amas a très rapidement posé le problème de la nature de cette émission. On savait que certains amas contenaient dans le gaz intergalaxies des électrons relativistes, détectés par leur émission synchrotron dans le domaine radio, et certaines théories prévoyaient une production de rayonnement X par interaction de ces électrons relativistes avec les photons du rayonnement universel à 2,7 K. Cependant, l’analyse spectroscopique du rayonnement X détecté permit, grâce notamment aux données des satellites britannique Ariel-5 et américain O.S.O.-8, de découvrir la présence de la raie caractéristique du fer vingt-quatre ou vingt-cinq fois ionisé, vers l’énergie de 6 kiloélectronvolts (fig. 12). Cette émission est la signature de l’existence d’un gaz chaud, à plusieurs dizaines de millions de degrés, très ténu, remplissant l’espace entre les galaxies dans les amas et représentant une masse équivalente à celle des galaxies. L’abondance de fer déduite des mesures X est à peu près la moitié de l’abondance de cet élément au voisinage du Soleil.La détection d’éléments lourds tels que le fer est la preuve qu’une partie non négligeable de ce matériau a subi un processus de nucléosynthèse et donc provient d’étoiles. (Plus récemment, les mesures effectuées à bord de différents satellites ont permis de détecter dans cette émission les raies d’autres éléments tels que l’oxygène, le silicium, etc.) Deux théories sont proposées: soit une expulsion violente de ce gaz enrichi de métaux au début de la vie des galaxies lors de la formation de l’amas, soit une perte progressive par un «déshabillage» des galaxies dû à la pression dynamique du gaz primordial dans l’amas.D’après les observations des satellites, la morphologie de l’émission X des amas de galaxies semble se diviser en deux catégories. Certains amas, comme les amas de Persée et de Coma, ont une émission uniforme, relativement piquée vers le centre, avec une assez haute température (100 millions de degrés) pour le gaz émissif. Pour d’autres, au contraire, comme l’amas de Virgo, l’émission est plutôt concentrée autour des galaxies de l’amas et se présente sous forme de taches, la température du gaz étant plus faible (de l’ordre de 10 millions de degrés).L’existence de nombreux cas intermédiaires conduit à penser que ces différences ne refléteraient que différents stades d’évolution.Les galaxies actives. Les quasarsOn pense généralement que les phénomènes qui se produisent dans les noyaux d’objets tels que les galaxies de Seyfert, les lacertides ou les quasars, se ressemblent fortement. Les observations dans les domaines radio et optique peuvent être (très schématiquement) expliquées par l’existence d’une forte source centrale entourée de nuages ayant une densité de 109 particules par centimètre cube, et une température de 104 kelvins, eux-mêmes plongés dans un milieu plus chaud et plus ténu. Or, en rayons X, on a observé que le flux provenant de certains de ces objets pouvait varier en moins d’une journée: cela implique que la dimension de la région dans laquelle se produit le rayonnement est inférieure à 1 jour de lumière.Les luminosités en rayons X de ces objets sont comparables aux luminosités mesurées en radio et en optique. Elles sont de l’ordre de 5 練 1033 à 5 練 1036 watts pour les galaxies de Seyfert de type 2, de 1035 à 1038 watts pour les galaxies de Seyfert de type 1, et de 1036 à 1041 watts pour les quasars.Dans le domaine X, les galaxies de Seyfert se présentent comme un ensemble relativement homogène. Pour les objets observés entre 2 et 20 kiloélectronvolts, les spectres sont bien représentés par une loi en puissance, avec des indices peu différents d’un objet à l’autre. Cette forme de loi semble écarter les phénomènes thermiques au profit de processus faisant intervenir des électrons relativistes (rayonnement synchrotron, effet Compton inverse). Dans le cas de NGC 4151, le flux est suffisant pour qu’on puisse faire une étude détaillée du spectre, y compris vers les basses énergies (face=F0019 力 0,5 keV). Cette étude spectrale effectuée d’abord par le satellite Einstein est en accord avec la représentation, obtenue par ailleurs, d’une source centrale entourée de nuages ne recouvrant celle-ci qu’à 90 p. 100. La source X a une dimension inférieure à 1,5 seconde d’angle, donc moins étendue que la région émettant les raies interdites observées en optique.On a pu aussi compléter l’étude des jets d’électrons relativistes des galaxies très particulières que sont M 87 et 3C 273. Des images de ces jets ont été obtenues. Et le flux mesuré en rayons X indique que dans chaque cas il existe une «cassure» dans le spectre du jet, située entre le domaine optique et les rayons X. Cette cassure s’explique par la perte d’énergie des électrons relativistes qui produisent le rayonnement par effet synchrotron dans un champ magnétique.D’innombrables quasars ont été détectés comme émetteurs de rayons X. Cependant leur flux est très faible; leur étude spectrale est donc délicate, et on se contente souvent de définir un indice à partir des flux mesurés en optique et en rayons X, ou un indice de dureté à partir de deux mesures en X. On ne constate pas de fortes variations de ces deux indices avec le décalage vers le rouge. Pour les quasars également émetteurs en radio, on observe une corrélation nette du flux radio et du flux X.Signalons enfin que les théories prévoient, pour expliquer les phénomènes observés dans les galaxies actives ou les quasars, l’existence de trous noirs ayant plusieurs milliers de fois la masse du Soleil.Le fond X diffus extragalactiqueNous avons déjà vu que dans le domaine des très basses énergies (face=F0019 麗 2 keV) il existe une émission X thermique, diffuse, fortement anisotrope, produite très vraisemblablement par le milieu interstellaire galactique.À plus haute énergie, la contribution de cette composante galactique est négligeable. Cependant, si l’on retranche des observations faites avec des télescopes à grand champ l’émission des sources X localisées, le ciel apparaît uniformément brillant. Ce «fond» diffus est parfaitement isotrope (degré d’anisotropie inférieur à 力 1 p. 100), au moins dans la gamme d’énergie s’étendant de 2 à 60 kiloélectronvolts. Au-dessous de 2 kiloélectronvolts, cette composante existe probablement mais elle est masquée par l’émission galactique. À haute énergie, elle se manifeste jusque dans le domaine du mégaélectronvolt, mais les mesures sont moins précises et ne permettent pas d’affirmer son caractère d’isotropie.L’isotropie quasi parfaite du fond diffus observée entre 2 et 60 kiloélectronvolts est la preuve d’un manque total de corrélation avec les structures de la Galaxie, et suggère que ce fond diffus soit d’origine extragalactique. S’agit-il d’un phénomène réellement diffus agissant dans l’espace intergalactique ou bien de la superposition d’un ensemble de sources extragalactiques non résolues, ou encore de la somme de deux origines? La question reste ouverte et de ce point de vue l’existence du fond diffus est un des problèmes les plus mystérieux de l’astronomie des rayons X.Sur quels éléments sont fondées les explications actuelles? Essentiellement sur les informations spectrales relatives au fond diffus et aux sources extragalactiques et sur les observations du satellite Einstein.Le spectre du fond diffus est continu et peut être représenté par une émission de Bremsstrahlung thermique de température 3 練 108 K (k T = 40 keV). Cette émission thermique pourrait être due à un milieu extragalactique ténu porté à une haute température au cours d’une des étapes de la formation de l’Univers. Cependant la grande quantité d’énergie nécessaire au chauffage du gaz rend cette hypothèse fragile.En ce qui concerne la contribution de sources extragalactiques non résolues, les résultats sont un peu plus encourageants: le grand nombre d’objets extragalactiques (quasars et galaxies de Seyfert) découverts permet d’estimer qu’ils contribuent pour quelques pour-cent à quelques dizaines de pour-cent à l’intensité du fond diffus (tout au moins dans la gamme d’énergie E 麗 5 keV). Il est probable que les objets à évolution rapide (très brillants dans le passé et difficilement visibles actuellement au voisinage du système solaire) comme les quasars doivent jouer un rôle dominant dans la création du fond diffus. Cependant des problèmes subsistent: les quelques spectres connus de quasars et autres objets extragalactiques ne permettent pas de reproduire le fond diffus dans une gamme d’énergie étendue, et il est probable que la contribution de chaque type d’objets varie avec l’énergie.En conclusion, nous pouvons dire que si la contribution d’un mécanisme réellement diffus lié au milieu intergalactique ne peut être définitivement exclue, une participation substantielle d’objets extragalactiques non résolus est quasi certaine. Cependant, la qualité des observations réalisées ne permet pas encore de déterminer la contribution de chacune des sources.Les années 1990 devraient apporter des informations capitales dans ce domaine: la mise en orbite de l’observatoire A.X.A.F., qui aura une sensibilité dix à cent fois meilleure que celle de l’observatoire Einstein sur une gamme d’énergie plus étendue, permettra d’étudier plus en profondeur la structure du fond diffus; beaucoup d’objets actuellement non résolus seront observés. D’autre part, le développement de nouveaux instruments à haute sensibilité spectrale et spatiale dans la gamme de 10 à 100 kiloélectronvolts donnera des informations spectrales dans une gamme étendue sur beaucoup d’objets faiblement lumineux pouvant contribuer au fond diffus.
Encyclopédie Universelle. 2012.